Dans le coeur de la montagne, à l'est du Lac Noir

La petite troupe s'arrêta. Borokk le Nain avait décidé qu'il était l'heure de manger et ses compagnons étaient bien de son avis ! Cela faisait un bon moment qu'ils n'étaient pas sortis des tunnels, mais personne ne s'en plaignait car qu'est-ce-qui pouvait leur arriver dans ces tunnels ? Se faire attaquer ? Ils savaient se battre ! Manquer de nourriture, d'eau ? Ils en avaient en abondance, non vraiment il ne pouvait rien se passer de fâcheux.

Un peu plus tard, ils se remirent en route, vers l'est. Les tunnels dans lesquels il progressaient semblaient avoir été creusés en toute hâte. Ils avaient récemment quitté les mines de Karak Varn, dépassés le Lac Noir et continuaient vers l'est, vers Mont Gunbad. Borokk le Nain n'ignorait pas, bien entendu, qu'il s'agissait là d'un repaire gobelin, mais ce n'était pas leur destination, simplement leur direction ! De l'or se trouvait un peu plus loin, l'ingénieur en était persuadé, et cet or, toute sa compagnie le voulait.

Les heures passaient et les nains se faisaient de plus en plus méfiants : des gobelins se trouvaient dans les environs. Lorsqu'il le sera nécessaire, la Compagnie de Brokk le Nain saura prendre les armes, oublier leur quête d'or, et tuer ces peaux vertes, mais elle préférait progresser rapidement afin de trouver toujours plus d'or ! Leurs ennemis jurés se terraient dans leurs grottes et n'en sortirait que pour les affronter, ou pour affronter d'autres peuples peu importe. Toujours est-il que le groupe avançait, guettant le moindre signe qui pourrait leur indiquer la présence de Gobelins, d'Orques ou autre créature aussi stupide que bonne à divertir les Nains.

Dans le noir des tunnels, la compagnie continuait encore et encore, avançant lentement mais sûrement. Leur dernière pause remontait à de nombreuses heures mais la fatigue ne se faisait pas ressentir, Brokk le Nain se plaisait à dire que personne, dans sa compagnie, ne savait ce qu'était la fatigue. Si tout allait bien, il arriverait prochainement à destination, là où l'or se trouvait. Alors la compagnie s'arrêterait et s'organiserait afin de procéder à l'extraction de la richesse. Alors, Brokk le Nain pourrait inventer de drôle de choses. De drôles de choses qui se révéleraient être aussi belles qu'inutiles, mais c'était pour son ingéniosité qu'il était le chef ! Le chef de "La Compagnie de Brokk le Nain" !

La troupe s'arrêta. Encore une fois, les Nains avaient marché longtemps, si longtemps qu'ils ne se souvenaient plus de leur dernière pause. Pourtant les plus fiers continuaient de louer leur endurance et leur force : la fatigue touchaient leurs compagnons mais pas eux ! Le seul problème était que, absolument tous les Nains de la compagnie pouvaient être qualifiés de "plus fier" !

Brokk le Nain balaya la compagnie du regard. La fatigue était visible après ces longues heures de marche. Il fut donc décidé que la "Compagnie de Brokk le Nain" passerait la nuit ici, dans ces tunnels ! On s'organisa, on sortit les victuailles et on commença à parler, chacun parla plus fort pour couvrir la voix des autres. Tous les Nains voulant raconter leur histoire, Brokk le Nain se disait qu'un gobelin se serait immédiatement enfui, croyant que ce vacarme provenait d'une gigantesque armée naine. Alors qu'ils n'étaient pas quarante.

Malgré le fait que, à chaque fois, un des Nains se mettait à crier que c'était à son tour de parler et pas à l'autre, tous ici affectionnaient particulièrement ces moments. Les plus âgés, vivant bien souvent dans les forteresses naines, se plaisaient d'ailleurs à dire que ce qui faisait le charme des voyages, c'était ces moments fraternels qui procurait à la fois plaisir et détente.
On continua de parler longtemps, plus longtemps que d'habitude car, bien que personne dans "La Compagnie de Brokk le Nain" n'ait peur des Gobelins, Orques ou autres créatures malfaisantes, peu de Nains s'aventuraient aussi loin dans les montagnes. Tous les membres de la Compagnie avait leurs armes à portée de mains, y compris les quelques sentinelles qui ne pouvaient se reposer. Brokk le Nain leur avait assigné la surveillance du camp pour quelques heures : jusqu'à ce que d'autres de ces êtres trapus viennent les remplacer.

Un peu plus loin, le maître ingénieur discutait avec deux autres Nains. Eitri était le plus petit de la Compagnie. Il était l'un des arquebusiers, l'un des plus habiles ce qui lui valait d'être le seul, avec Brokk le Nain, a pouvoir commander les arquebusiers. Alviss était, quant à lui, considéré comme le plus sage et le meilleur combattant, après le chef. Sa barbe était la plus longue et la plus belle de la Compagnie et tous les Nains, Brokk le Nain inclus, le respectaient. Il avait été dit que si Brokk le Nain tombait, Eitri prendrait sa suite, et aucun Nain ne s'y opposerait si cela arrivait car, la jalousie était oubliée pour ne pas les détourner du chemin qui pourrait, un jour, les mener à la gloire.

Eitri vint réveiller Brokk le Nain. Le second avait en effet insisté auprès de son supérieur afin qu'il lui permette de faire partie de l'avant-dernier groupe de garde. En compagnie de deux autres arquebusiers et d'un longue barbe, le Nain, plus petit que la moyenne n'avait rien à signaler. Rien jusqu'à ce que l'une des sentinelles annonça, d'un bref signe de tête, que quelque chose s'approchait. Les mouvements perçus étaient rapides et se voulaient imperceptibles. Seulement, un Nain ignore ce que veut dire le mot imperceptible lorsqu'il se trouve dans les ténèbres. Eitri fit part à Brokk le Nain de son inquiétude, inquiétude qui fut partagée.

Après avoir entendu ces dires, Brokk le Nain ordonna que l'on réveille tous les Nains de la Compagnie, en silence. Un poignée de secondes plus tard, le Nain sourit, tenant fermement sa hache : rien n'aurait pu faire savoir aux "visiteurs" que les Nains étaient debout, prêt à combattre cet ennemi. Ils ne savaient d'ailleurs pas s'il s'agissait réellement d'un ennemi, mais la volonté de ne pas se faire repérer avait éveillé la méfiance des sentinelles, méfiance qui s'éveillait pour peu de choses. Toujours est-il que, à présent, les arquebusiers prenaient place alors que les longues barbes se séparaient en deux groupes : le plus conséquent autour de Brokk le Nain, l'autre autour d'Alviss. Le premier groupe affronterait l'ennemi de face alors que le second passerait par l'un des tunnels voisins afin de prendre l'ennemi à revers. Le nombre risquait de ne pas être l'avantage des Nains, la surprise et leur bravoure le serait !

Eitri et les arquebusiers s'étaient placés. L'endroit n'avait pas choisit par hasard mais parce qu'il était aisément défendable : les arquebusiers se trouvant à des endroits stratégiques désignés par Eitri, nombreux seraient les ennemis qui tomberaient sans voir le visage du responsable. Eitri, quant à lui, se trouvait à côté du piège que créait toujours Brokk le Nain, ce piège simple mais redoutablement efficace consistait tout bonnement à faire tomber de gros blocs de granite afin de boucher le tunnel, bloquant ainsi leurs adversaires qui se retrouvaient coincés, avec pour seule issue de faire demi-tour. Ce piège permettait aussi bien de tailler l'ennemi en pièce que de s'enfuir. Mais "La Compagnie de Brokk le Nain" n'avait encore jamais eu à fuir devant l'ennemi et espérait que ce moment n'arriverait jamais.

La troupe s'approcha, il s'agissait d'une troupe de Gobelins de la Nuit comme les Nains s'y attendaient. Une petite vingtaine s'approchait : le combat devrait donc être court car, si la compagnie se révélait incapable de vaincre un ennemi inférieur en nombre, en équipement et n'ayant ni l'avantage de la position, ni celui de la surprise, il était urgent de retourner à l'abri des forteresses naines ! Brokk le Nain demanda brièvement à Valaya de protéger les Nains et à Grimnir de lui permettre à tuer le plus possible de ces créatures. Alors que ces dernières étaient désormais visible pour l'ensemble des arquebusiers qui leur restaient, quant à eux, invisibles, les longues barbes se tinrent prêt à courir vers leur ennemi en rugissant, pour se donner du courage, pour détruire celui de l'ennemi et pour libérer cette haine pour ce peuple. Les Gobelins de la Nuit ne virent pas que des arquebusiers nains se préparaient à tirer, et ce malgré leurs compétences dans les ténèbres. Aussi leur surprise fut grande lorsque, le premier Gobelin tomba.

Alors, Brokk le Nain cria. Les longues barbes l'imitèrent et tous commencèrent à courir vers les peaux-vertes. Le temps qu'elles réalisèrent ce qui se déroulait, la moitié d'entre eux était tombé sous les tirs des arquebusiers, n'en laissant que quelques uns faire face aux dix longues barbes menés par Brokk le Nain. Comme ce dernier l'avait prévu, le combat fut bref. Si bref que lorsque, Alviss et les cinq longues barbes restantes arrivèrent, il ne restait plus un seul Gobelin en vie.

Les Nains ne trouvèrent rien de réellement d'intéressant sur les corps, dépourvus de la moindre parcelle de vie. Les quelques pièces ne consolèrent pas ceux qui avaient contournés l'ennemi, ceux qui n'avait pu affronté cet ennemi trop faible.

Brokk le Nain demanda le silence. Lorsqu'il l'obtint, il parla, haut et fort, afin que chaque Nain présent puisse l'entendre :

Mes amis !

Ces vermines sont mortes, et vous m'en voyez réjouis car je ne pense pas qu'il mérite mieux pour avoir troublé notre nuit !

L'assemblée marqua son accord avec les paroles de leur chef qui attendit quelques secondes avant de continuer :

Ils étaient faibles, stupides et trop peu nombreux pour pouvoir nous inquiéter, nous "La Compagnie de Brokk le Nain" !

A nouveau, les Nains voulurent manifester leur joie mais cette fois, Brokk le Nain n'attendit pas.

A présent je vous laisse choisir ! Je vous demande votre avis ! Allons nous rester dans nos montagnes, attendre qu'une vingtaine de Gobelins viennent nous tirer de notre sommeil, les massacrer puis nous recoucher afin d'attendre d'autres Gobelins ?
Je vous pose cette question car le monde a besoin de Nains courageux, comme nous !
Dehors, les peuples se combattent, non sans raison, c'est vrai ! Car en tant que Nain je considère que le plaisir de tuer est la meilleure des raisons !
Dehors, nous rencontrerons des adversaires qui se montreront digne de mourir sous nos coups !
Dehors, nous rencontrerons des alliés qui se montreront digne de s'entendre avec nous, digne de se battre à nos côtés !

Alors je vous le demande, voulez-vous rester dans ces tunnels alors que le monde sombre dans le chaos ? Alors que trop de guerriers peuvent aujourd'hui se dire que tant qu'il n'y aura pas d'armée naines prêtes à les affronter, ils ne risqueront rien ?
Car c'est ce qui se passe croyez-moi ! Nos Dieux veulent que des Nains montrent leur bravoure, que des Nains montrent que, quoi qu'il arrive, les Naines doivent être craints !

Grâce à notre courage et à mes inventions, nous pourrons devenir l'armée naine la plus puissante que vous puissiez imaginer !

Il ne fallut que quelques secondes aux Nains, après ces dernières paroles, pour affirmer leur volonté de sortir, et de combattre.

Très bien, dans quelques jours nous sortirons du coeur de la montagne. Alors, faites-moi confiance : les ennemis ne manqueront pas !
Et alors, nous rammasseront l'or non pas dans les mines, mais sur les corps des vaincus !

Chacun se prépara et la troupe se mit en route. Lorsque Alviss et Eitri demandèrent à Brokk le Nain s'il savait ce qu'il faisait, ce dernier leur répondit qu'il les menait sur un chemin qui leur permettrait d'atteindre la richesse, et la gloire.

"La Compagnie de Brokk le Nain" continuait de progresser en direction du sud-ouest : vers la capitale Karaz - A - Karak. Là-bas, Brokk le Nain comptait bien voir les rangs de la troupe grossir car il le savait : actuellement ils n'étaient rien. Ils avaient entendu des récits sur de gigantesques armées, aussi "La Compagnie de Brokk le Nain" serait aussitôt anéantie s'ils croisaient une armée digne de se faire appeler ainsi.

Depuis l'embuscade tendue aux Gobelins et parfaitement réussie, aucun Nain n'avait changé d'avis : ils allaient sortir des montagnes, rencontrer de nouveaux adversaires qui pourraient les confronter à une opposition réelle. En multipliant les victoires, "La Compagnie de Brokk le Nain" pourrait alors gagner en renommée. D'autres petits êtres la rejoindrait et alors, à cet instant, on ne pourra plus ignorer la compagnie. A cet instant, elle serait redoutée car sa valeur aurait été reconnue depuis un temps déjà. Mais la route était encore longue jusqu'à cette gloire, alors que les Nains pouvaient apercevoir Karaz- A - Karak, au loin.

Celle qui est appelée "Pic éternel" par le peuple des hommes, impressionna les membres de "La Compagnie de Brokk le Nain", bien que ce ne soit pas leur première visite. La porte de la cité était le premier rempart de la cité, mais ce premier rempart semblait de jamais pouvoir tomber, que ce soit face aux hordes de peaux-vertes, ou tout simplement face à la puissance du temps qui passe. La porte immense franchie, les Nains redécouvrirent la cité qui dégageait une sensation de puissance mêlée à un sentiment de respect. Quiconque entrait ici ne pouvait que se trouver subjugué par la magnificence du lieu où réside le Roi des Nains.

La première étape de la compagnie fut choisie par Eitri : la taverne ! Ils se rendirent dans la plus proche afin de retrouver une ambiance chaleureuse à laquelle ils n'avaient pas goûté depuis leur départ, des semaines auparavant. L'ensemble de la troupe repèra une table qui semblait suffisamment grande pour tous les accueillir. Et quelle chance ! Elle était libre ! Enfin, presque libre, car les quatre Nains s'y trouvant n'allaient sûrement pas tarder à la quitter !

En effet, ils finirent leur bière et quittèrent la taverne, permettant à "La Compagnie de Brokk le Nain" de s'y installer. Les bières commencèrent à arriver, au plus grand bonheur des êtres trapus ! A cet instant, les membres de la troupe commencèrent à raconter leurs exploits. Exploits qui d'ailleurs n'avaient pas encore été réalisés ... A ces dires, une petite foule se rassembla autour de la table afin d'écouter les hauts faits de ces buveurs dont les chopes ne cessaient d'être vides. Quelques-uns demandèrent même à rejoindre la compagnie, mais Brokk le Nain refusa fermement, sachant très bien que ce que racontait ses compagnons n'étaient que de pures mensonges destinés à impressionner les naïfs et à séduire les Naines présentes.

Quelques heures plus tard, deux Nains sortirent de la taverne. Ils se dirigèrent dans une seconde auberge après avoir fixé une soixantaine affiches sur les murs de la cité. Brokk le Nain était optimiste, il savait que dire pour inciter les Nains présents à rejoindre sa compagnie, pour le meilleur ! Sûrement pas pour le pire, Brokk le Nain refusait d'envisager cette optique ! Monté sur la table qui se situe au centre de la taverne, Brokk le Nain prit la parole :

Ecoutez-moi !! Ecoutez-moi !!

Je suis Brokk le Nain, maître ingénieur nain et le chef de "La Compagnie de Brokk le Nain" !

Quelques têtes se baissèrent afin de reprendre les discussions mais la plupart ne bougèrent pas, afin de continuer à regarder le guerrier.

Nous avons été en plein territoire gobelin, à l'est du Lac Noir, et pas un seul d'entre nous est mort ! En revanche des Gobelins sont morts croyez-moi !

Oui ... Une petite quinzaine à laquelle nous avons tendue une embuscade et à laquelle je n'ai pas participé, pensa Alviss. Mais peu importe, se disait-il, Brokk le Nain ne ment pas, il joue avec les mots. Et cela va nous permettre de recruter et de grandir !

A présent, nous avons l'intention de partir, de quitter les montagnes afin de croiser de nombreux peuples, pour les combattre ou pour s'allier, cela dépendra d'eux ! Mais ceux qui choisiront de nous affronter regretteront leur décision !

Brokk le Nain fit une pause afin de boire une gorgée d'une chope traînant sur la table, alors que ceux qui écoutaient criaient, appréciant ces paroles et attendant la suite.

Cependant, à l'heure actuelle nous ne sommes pas suffisamment nombreux ! Tous ici, vous avez entendu parler des gigantesques armées qui guerroient actuellement ! Pour pouvoir compter parmi les armées redoutées de ce monde, nous devons être plus nombreux ! Nous avons besoin de vous !

D'autres cris de contentement se firent entendre, sans que l'on puisse réellement déterminer leur origine.

J'ai l'intention de montrer que les Nains ont conservé toute leur puissance, et que ceux qui nous considèrent comme incapable de les vaincre se trompent ! En utilisant notre technologie et notre courage nous pourrons massacrer nos ennemis !

Brokk le Nain balaya la salle du regard, sentant bien que nombres de ceux qui l'écoutaient était captivés. Ça commençait bien : dès la première taverne il allait trouver des volontaires !

A partir de demain matin, les volontaires pourront nous rejoindre ! Des affiches ont été placardées partout dans la cité par les membres de notre compagnie. Dessus vous saurez où nous trouver !

Et à présent, j'offre à boire à tout le monde ici. Sans exception, et je demande à ce que nous buvions à la magnificence du peuple nain !
Ceux qui nous sous-estiment aujourd'hui nous craindront demain !

Tous les Nains dans la taverne agirent alors comme s'ils n'étaient qu'un : ils saisirent une chope, la levèrent et crièrent à l'unisson :

Au peuple nain !

Très bien, bienvenue parmi nous mon ami !

Cela paraissait être la cent cinquantième fois que Brokk le Nain entendait cette phrase, Alviss ne se lasserait donc jamais ? A chaque fois qu'un Nain venait, Alviss inscrivait son nom sur une longue feuille, l'assignait à un poste selon les disponibilités, les volontés et les capacités ! Ainsi, "La Compagnie de Brokk le Nain" était en train de changer de dimension, de venir une armée à part entière. Moins de trente il y a encore quelques jours, plus d'une centaine de nom apparaissaient sur la feuille d'Alviss ! De plus, de son côté, Eitri faisait la même chose : encore un jour ou deux et la troupe serait suffisamment nombreuse pour quitter Karaz - A - Karak !

Brokk le Nain s'interrogeait d'ailleurs sur la direction à prendre. Nombreuses étaient les discussions qui parlaient des évènements en Bretonnie, à l'ouest. De grandes armées seraient en train de déferler sur la Bretonnie, pour la piller ou, au contraire, la protéger. Brokk le Nain hésitait à s'y rendre, il estimait savoir trop peu de choses sur les armées en question. A quoi bon s'y rendre si la compagnie était anéantie dès le premier affrontement ? De toute façon, Brokk le Nain avait décidé, avec Eitri et Alviss bien sûr, que le départ ne se ferait que dans deux jours, au plus tôt. Il leur restait donc deux jours pour allécher d'autres Nains avec leurs discours de gloire et de richesse, dans l'optique de les recruter bien sûr ! Mais le chef n'était que moyennement satisfait : il était Maître Ingénieur et avait l'intention de renforcer sa compagnie par de puissantes armes, fruit de la technologie naine ! Il lui fallait donc trouver un moyen d'obtenir un endroit où il pourrait travailler à la confection de puissantes armes !!

Vous êtes bien Brokk le Nain ? Le chef de "La Compagnie de Brokk le Nain" ?

Ses paroles arrachèrent le concerné de ses pensées et lui firent lever deux yeux sur l'inconscient. Tout le monde dans la compagnie savait qu'il était importun de l'arracher à ses pensées ! Et lorsqu'il était assis, le regard dans les vide, cela voulait dire qu'il était perdu dans ses pensées.

Je me présente, je me nomme Burlok Damminson, savez-vous qui je suis ?

Toute méfiance quitta la paire d'yeux qui le fixait, méfiance remplacée par du respect, et même de l'admiration ! Tous les Nains connaissaient Burlok Damminson : il était l'un des Nains les plus connus, considéré comme le meilleur Ingénieur Nain encore en vie ! Le Maître de la Guilde des Ingénieurs n'avait d'égal, même dans la Guilde qui comptait tous les Maîtres Ingénieurs talentueux ! Aussi, sa présence dans cette taverne intrigua Brokk le Nain qui acquiesçait à la question posée.

Bien, votre "recrutement" fait beaucoup de bruit, que ce soit ici, à Karaz - A - Karak, ou dans les autres forteresses naines ! Même dans les villages, on parle de vous et de vos récits.

Le regard perçant, le Nain continua :

Votre but est louable. Redonner au peuple Nain sa gloire militaire d'Antan, cela plait au peuple Nain, qui ne voudrait pas que son peuple soit reconnu, comme autrefois, comme l'un des peuples les plus valeureux ?
Cependant ...

Jusqu'à ce dernier mot, Brokk le Nain ne pouvait que se sentir flatté, pourtant, la suite risquer de se révéler moins plaisante ...

Cependant, je ne vois pas comment vous comptez opérer. Pouvez-vous m'éclairer à ce sujet ? Remporter des victoires, cela me semble plaisant mais encore faut-il que ces victoires soient connues ! Si vous anéantissez une minuscule tribu voisine, comment voulez-vous que cela soit su et admiré ?

Brokk le Nain se contentait, pour une fois, d'écouter.

Vous savez sûrement que la Bretonnie est en proie à de grands évènements, évènements qui, peu importe l'issue, constitueront une page importante de l'Histoire.
Certains pensent que nous devrions intervenir, personnellement je suis de l'avis de notre roi : nous avons suffisamment à faire ici, dans les montagnes, pour aller livrer bataille à l'ouest.
Cependant ...

Décidément, Brokk le Nain n'aimait pas ce mot lorsque Burlok Damminson l'employait.

Cependant, si vous souhaitez devenir connu, et cela rapidement, intervenir en Bretonnie me parait un bon moyen.
Personne ne vous force à y aller, mais si vous le décidez, vous pourrez y aller en toute tranquillité, personne ici ne contestera votre décision, pas même notre roi, croyez-le !

Ces paroles ne faisait que renforcer son sentiment à ce sujet : le chef de la troupe ne savait que faire ... Nombreux seraient les Nains qui risqueraient d'y mourir, et Brokk le Nain ne souhaitait pas conduire sa compagnie vers une mort certaine !

Pourtant, vous risquez fort d'y être vaincu, c'est donc à vous de prendre la décision ... J'ai cru entendre que vous prendrez le départ prochainement ?

L'Ingénieur fit quelques pas avant de reprendre la parole alors que le second Nain hochait lentement la tête.

Si vous voulez rendre au peuple Nain sa gloire d'antan, vous devrez vous battre avec les armes naines. Vous avez des combattants nains, mais avez-vous les armes naines ?

Une lueur d'espoir apparut dans les yeux de Brokk le Nain :

Malheureusement non, je cherche depuis notre arrivée comment faire, mais je ne trouve pas de solution qui me permettraient de me procurer ce que je voudrais ...

Et que voulez-vous au juste, répondit son interlocuteur, que voulez-vous ?

J'ai conscience que ce que je demande est conséquent, mais cela sera également conséquent sur le champ de bataille, dit Brokk le Nain. Je souhaite acquérir un Gyrocoptère ...

En effet, le coupa Burlok Damminson, cela sera difficile ...

A vrai dire, ajouta le chef de la troupe, ce n'était qu'une des trois armes dont je souhaite disposer. Je voudrais également pouvoir combattre en comptant sur un Canon, et sur un Canon à flammes ...

Il avait conscience que ce qu'il demandait était beaucoup, mais avec un armement aussi conséquent, "La Compagnie de Brokk le Nain" serait bien plus redoutable qu'à l'heure actuelle.

Très bien. Notre Roi vous soutient dans votre folie guerrière. Il compte d'ores et déjà vous fournir deux troupes de Marteliers Nains et m'a demandé de vous aider à vous procurer un armement conséquent.

Le Maître de la Guilde des Ingénieurs fit une pause, lisant sur le visage de Brokk le Nain son étonnement.

Attendez trois jours, alors nous vous donnerons ce que vous désirez. Nous vous donnerons également le nécessaire pour entretenir, et réparer, l'ensemble.
Sur ce, je vous souhaite bonne chance dans votre recrutement.

Burlok Damminson sortit après avoir adressé un signe de tête à Brokk le Nain, ainsi qu'à Alviss, toujours occupé à noter les noms des recrues. Ce dernier alla voir son chef quelques minutes plus tard :

Eitri a recruté 74 hommes. Sur ma feuille je dispose de 81 noms, ce qui nous fait un total de 184 combattants Brokk et ..

et bientôt nous posséderons un Gyrocoptère, un Canon et un Canon à flammes, coupa ce dernier.

Il raconta tout à Alviss, afin d'étancher la curiosité de ce dernier. Un sourire apparut sur le visage du sage de la troupe : ils se rapprochaient de leur objectif ! Ne plus pouvoir ignorer "La Compagnie de Brokk le Nain" !

Bon alors, tout le monde est prêt, demanda Brokk le Nain à Alviss.

Ce dernier se contenta de hocher la tête. Peut-être avait-il répondu mais le chef n'avait pas entendu, les nouvelles recrues faisaient tellement de bruit qu'on ne s'entendait pas à trois mètres ! Le soleil s'était levé il y a peu, et l'ingénieur se dit que le sage avait raison : s'ils restaient trop longtemps là il y aurait du grabuge : personne n'aurait pu dormir avec un tel vacarme ! Seuls les Marteliers étaient silencieux. On leur avait ordonné d'accompagner Brokk le Nain dans sa quête de richesse et de gloire et si cela les leur déplaisait, ils veillaient à ne pas le montrer. Professionnels, voilà comment on aurait pu les qualifier, mais après tout, c'est ce qu'on attendait de l'élite des guerriers Nains.

Alviss partit, immédiatement suivi par l'ensemble de la troupe, en direction des portes. Ils devaient rejoindre Eitri, qui seraient normalement accompagnés des autres recrues, hors de la cité. Brokk le Nain partit dans l'autre sens, dans la direction de la taverne dont il avait fait son lieu de recrutement, la taverne où il avait rencontre Burlok Damminson. Ce dernier lui avait promis qu'on lui confierait ce qu'il avait demandé aujourd'hui, et Brokk le Nain ne savait où les retrouver ... "Nous vous trouverons, et non l'inverse" avait dit le membre de la guilde ... Cette fameuse guilde dans laquelle Brokk le Nain était resté quelques années avant de partir à l'aventure, avec quelques compagnons.

Ah, le voilà !

Un Nain s'approcha, joyeusement. Il était légèrement plus grand que Brokk Le Nain qui, était loin d'être grand. Il avait une barbe rousse à laquelle s'ajoutait une petite touche brune. Il était bien, habillé, bien mieux que ne l'avait jamais été nombres de Nains dans le royaume !

Vous êtes bien Brokk le Nain, n'est-ce-pas ?

En effet, répondit l'intéressé, loin d'être impressionné.

Si vous voulez bien me suivre, vos canons sont prêts. Votre gyrocoptère également ! Vous n'aurez pas besoin d'hommes pour les emmener, vous verrez pourquoi. De toute façon, je crois que vous n'aviez pas pensé à ce point, heureusement que Burlok Damminson y a réfléchi, lui.

Et heureusement que Brokk le Nain savait se contrôler, parce que lui, il possédait une grande hache, dans son dos ... Il suivit ce Nain, celui-ci n'hésitant pas à prendre de haut ceux qu'ils croisaient. Plus d'un aurait applaudit si le chef de la troupe avait décapité sur place l'importun, mais ce n'était sûrement pas le moment de s'emporter, il aurait bientôt ses canons. Et son gyrocoptère, et alors les peuples ne pourraient que redouter "La Compagnie de Brokk le Nain".

Les deux Nains quittèrent la cité. Brokk le Nain ne disait rien, ne désirant pas entendre, une fois de plus, cette voix à la fois joyeuse et énervante. Dehors, un spectacle à la fois impressionnant et réjouissant avait lieu. "La Compagnie de Brokk le Nain" se rassemblait et s'organisait. Eitri criait ses ordres et les Nains les exécutaient, sans broncher. Certes, on était loin de l'armée dont Brokk le Nain rêvait : une armée de plusieurs milliers de Nains ... Le nombre de guerriers devait légèrement dépasser les 200, mais c'est à cet instant que l'on pouvait se rendre compte que la compagnie avait changer de dimension : fini les voyages à une trentaine !

Les deux canons étaient déjà là, le gyrocoptère à leur côté. Plusieurs Nains étaient présents à leur côté et, malgré les explications du Nain joyeux, Brokk le Nain les questionna sur leur rôle. Ils étaient pour veiller au bon fonctionnement des engins, les déplacer et les utiliser. Eux aussi voulaient se couvrir de gloire en rendant la magnificence au peuple Nain, magnificence qui lui était due ! Ils furent accueillis chaleureusement par le chef.

Le joyeux repartit sans que Brokk le Nain ne le remarque, et de toute façon il ne se souciait plus de lui depuis qu'il avait vu sa compagnie. Après un long discours pour vanter les mérites de chacun, le chef ordonna le départ.

Dans quelques jours, les Nains quitteraient les montagnes.